Faire participer les jeunes : la démocratie et ses bouleversements.
- Maïlys Papeil
- 24 avr.
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Dernière mise à jour : 8 oct.
24 avril 2024.
A l’invitation du Doyen Guylain Clamour, le Président François Hollande est venu rencontrer les étudiants de la Faculté de Droit de Science Politique de Montpellier le 24 avril 2024 sur le thème « Faire participer les jeunes. La démocratie française et ses bouleversements », discutée et animée par la doctorante en science politique Maïlys Papeil.
A partir du choix des étudiants, le premier sujet portait sur l’éducation civique. Les étudiants soulevaient que l’EMC était alors trop peu enseignée et prise au sérieux dans leur cursus scolaire. Ils sollicitaient alors le point de vue du Président sur la question de la transmission et l’éducation des jeunes pour leur donner les moyens de participer à la vie politique de leur pays. Le Président Hollande a, à cette occasion, appuyé le fait que la famille, les partis politiques et les mouvements d’éducation populaire jouaient autrefois un rôle central dans cette transmission. L’Etat joue aujourd’hui un rôle plus important et contribue à l’éducation civique des plus jeunes, notamment par l’EMC dont il est à l’initiative. Il est quant à lui, particulièrement investi, par ses conférences et ses ouvrages, dans la transmission de ses connaissances de la vie politique et institutionnelle, mais aussi de son expérience exceptionnelle de Président de la République, pour contribuer à son échelle à l’éducation civique « des plus jeunes et des moins jeunes ». Il a insisté sur l'importance en effet de connaitre les principes de la Constitution, notamment le rôle du président, du gouvernement, du parlement, ou encore du pouvoir judiciaire et du Conseil Constitutionnel, ainsi que leurs champs d’action. Il a également insisté sur l’importance de transmettre l’histoire des grandes idées et des avancées politiques qui ont définis les contours de notre démocratie contemporaine. Tout l’enjeu revient alors à redonner, sinon, à rappeler, aux jeunes générations le sens de la démocratie et de la participation des citoyens.
Si l'abstention demeure par principe un choix légitime, il est néanmoins crucial que les citoyens prennent conscience, au cours de leur éducation, de l’importance du vote dans la démocratie représentative. Selon le Président François Hollande, le sentiment d'éloignement de la démocratie ressenti par beaucoup de nos concitoyens provient en partie d'une méconnaissance de ses mécanismes. En ce qui concerne l'efficacité de la politique d’éducation morale et civique, le Président a reconnu qu'il y a toujours, en politique, un écart entre l'intention et le résultat. La démocratie reste un processus et les projets sont à mener sur le temps long. Il a ainsi défendu la nécessité de créer un poste dédié à l’EMC et l'introduction d'une évaluation au Baccalauréat ou au Brevet, afin de garantir que les jeunes citoyens puissent exercer pleinement leurs droits.
L’éducation civique passe aussi par la découverte concrète de la vie institutionnelle et politique. Le Président Hollande a insisté sur l’importance des lieux de la démocratie, comme la mairie ou l’Assemblée nationale, encourageant les étudiants à les visiter, à les découvrir et à s’exercer aux activités démocratiques comme lors des dépouillements de vote, afin de comprendre leur fonctionnement. Il maintient alors : « Ce sont vos lieux, ils vous appartiennent, la démocratie est à vous. »
Ces dernières décennies, l’abstention des citoyens de moins de 30 ans est devenue un enjeu majeur pour l’avenir de la démocratie représentative, s'inscrivant comme un phénomène générationnel. Ce second sujet a pris une place centrale dans la conférence, avec des échanges portant sur le vote obligatoire, le vote blanc, le vote à 16 ans, et le vote électronique. François Hollande a ainsi évoqué ses souvenirs en tant que maire, où les habitants s’habillaient spécialement pour l’occasion, le dimanche, pour se rendre à l’isoloir, un lieu exclu de l’influence et des pressions sociales, une démarche civique et démocratique que ne permettent pas le vote électronique chez soi ou sur son lieu de travail. La discussion incluait également la montée de mouvements sociaux contestataires au détriment du vote et la défiance croissante des citoyens envers les acteurs politiques via les réseaux sociaux. Le Président Hollande a alors rappelé un principe essentiel : « La démocratie, c’est la contradiction. Si vous ne parlez qu’à des gens qui pensent comme vous, vous n’avancerez pas. ». Le vote des jeunes devrait s’inscrire dans un projet politique à long terme, plutôt que de considérer les confrontations de points de vue et les « likes » sur les réseaux sociaux.
Les étudiants ont fait part de leur critique sur l’hypocrisie de certains acteurs politiques, les scandales qui entachent leur fonction et les institutions, ou encore l’incapacité des représentants à appliquer de nombreuses promesses politiques. Sur l’immobilité des politiques publiques, le Président Hollande a évoqué son souvenir du choc du 21 avril 2002, lorsque Lionel Jospin a été devancé par Jean-Marie Le Pen, rappelant que, si les avancées peuvent être difficiles, le vote reste déterminant. Reste à la responsabilité des élus à se montrer exemplaires, un impératif que la Haute Autorité pour la transparence, créée sous son mandat, vise à garantir.
Les dernières interventions de la salle ont mis en lumière des tensions qui reflètent les grands débats traversant notre société : pourquoi les jeunes estiment-ils que manifester et contester ont plus d'impact que de s'engager en politique ? La perte de confiance envers les représentants nécessite-t-elle une réforme de la démocratie pour la rendre plus participative ? A ces questions, le Président Hollande se montre particulièrement sensible au dialogue social. « Il doit aussi y avoir des formules de démocratie participative mais il faut rester dans la démocratie représentative » dit-il. Si les grands mouvements comme le mariage pour tous ont marqué son quinquennat, ou par le passé la lutte du Larzac sous celui de François Mitterrand, ce sont, selon lui, les victoires politiques et l’accès aux fonctions de gouvernement qui conditionnent la réussite d’avancées politiques majeures. Si une leçon est à retenir de cette conférence, c’est bien l’importance du dialogue et la transmission entre les générations, car les avancées démocratiques ne se construisent qu’à partir de leur héritage.

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